REMÈDES POUR DES TEMPS TROUBLÉS

23 octobre 2023

On voudrait, follohoueurs, follohoueuses, se réveiller un matin pour apprendre que Poutine s’est retiré d’Ukraine et de Russie et qu’à l’issue d’un accord multipartite, plutôt que d’être jugé pour crimes de guerre, il finit ses jours dans un monastère du Tibet qu’entre-temps la Chine a évacué, en même temps qu’elle a cessé de menacer Taïwan et de massacrer ses Ouïghours.

On voudrait se réveiller et entendre que les Israéliens et les Palestiniens, épuisés de guerre, se sont convertis massivement au bouddhisme.

On voudrait entendre que la Terre a cessé de se réchauffer, les migrants de se noyer, les terroristes de terroriser, les riches d’exploiter, les virus de viraliser, les incendiaires d’incendier, les violeurs de violer, les pollueurs de polluer, les délinquants de délinquer, Trump de trumper, Le Pen de lepéniser et Mélenchon de mélenchoniser…

On voudrait, on voudrait… mais en attendant chaque fois qu’on allume la télé ou la radio, chaque fois qu’on ouvre un journal, on n’arrive pas à s’échapper et on se souvient de l’excellent Stephan Eicher nous rappelant dans Déjeuner en paix « les nouvelles sont mauvaises d’où qu’elles viennent ».

Alors ? Alors ? Alors j’y peux rien, moi, à part trier mes déchets et consoler mes amis juifs ou arabes qui sont tristes et inquiets. J’peux pas convoquer le Conseil de sécurité des Nations unies, le Conseil de l’Europe, qui d’ailleurs ne m’ont pas attendu, mais y peuvent pas grand-chose eux-mêmes.

Alors ? Je peux faire de mon mieux pour ne pas me plaindre de mes (petits) malheurs, ne pas faire payer aux autres mes (légères) frustrations, ne pas ajouter quelques gouttes d’amertume et de haine aux torrents de bile qui se déversent déjà de partout… Et…

Et quoi d’autre ?

Et je peux regarder les vieux films du merveilleux Billy Wilder, juif autrichien émigré à Berlin puis à Paris avant de devenir un des rois de Hollywood. Il me rappelle qu’on peut regarder avec lucidité un monde terrible et conserver une part de joie.

Et je peux aller au cinéma ou au théâtre un soir pour rire ou pleurer, au musée ou au concert pour me baigner de beauté…

Et je peux extraire de la pile un des livres qui m’attendent depuis trop longtemps.

Au bout du compte rien de tout ça n’est le remède qui sauvera le monde, mais ça m’aidera à vivre, moi, et à diffuser quelques ondes heureuses.