LES PROBLÈMES DE MME SIAKAM

5 juillet 2024

Mme Siakam est une avenante dame d’une cinquantaine  d’années qui finit de déjeuner en tête à tête avec sa fille lorsque j’arrive chez Stefano, mon ami traiteur végétarien du faubourg chez qui je vais prendre mon café tous les jours autour de 14 h 30, à l’heure où se termine le service de midi : les étudiants sont repartis étudier, les bureliers bureler, les touristes tourister ; ne passent plus que quelques habitants du quartier qui, affamés, viennent attraper le sandwich du jour, une des entrées du jour (hier arancini ou œuf parfait) un assortiment de salades ou le plat chaud (hier, dahl de lentilles corail), voire un de ses desserts (hier en plus de son légendaire carrot cake, une onctueuse crème caramel, une tarte aux pommes, un fondant au chocolat sans gluten et deux sortes de cookies).

La petite salle (quatre tables, huit places à l’intérieur plus un banc, quatre places à l’extérieur si le temps le permet) se vide de ses derniers clients et avec Stefano nous parlons philosophie de la vie, religion, famille et foot (dans ce maudit Paris qatarisé, nous partageons le même amour de l’OM).

Depuis quelques jours nos conversations tournent autour de l’Euro et de la possible arrivée au pouvoir des fachos. Nous nous exprimons sans crainte devant Mme Siakam qui partage nos craintes et tout en payant son addition nous donne quelques détails de sa vie : elle a cinq enfants (comme moi) avec le même papa (pas comme moi). Sous sa veste haute en couleurs une blouse bleue : elle est dentiste et partage un cabinet à proximité avec plusieurs collègues. Ça, ça m’intéresse car mon cher dentiste historique manifeste une certaine fatigue et je ne peux ignorer les signes avant-coureurs d’une retraite bien méritée. Mme Siakam sur sa lancée exprime ses craintes d’avenir : elle vient à peine de rembourser les emprunts liés l’ouverture du cabinet il y a dix ans, il va falloir engager d’autres dépenses pour renouveler le matériel, les charges de huit salariés sont assez lourdes, l’équation du quotidien complexe : ils effectuent un travail spécialisé de qualité, sont recherchés sur le marché du travail et pour le conserver il est indispensable de les payer nettement au-dessus du Smic. Si celui-ci est augmenté à 1 600 euros alors qu’ils en gagnent plutôt entre 1 800 et 2 000, il faudra les augmenter également, un coût auquel s’ajoutera l’augmentation mécanique des charges. Sans le dire explicitement, Mme Siakam craint donc presque autant l’arrivée au pouvoir du Front et celle du Nouveau front populaire. Elle n’est pas « macroniste » pour autant car a été heurtée par bon nombre des propos du chef de l’État et pense qu’il a joué avec le feu en se posant en « dernier rempart » de la version bordella de la peste brune.

Le gouvernement issu de l’« assemblée plurielle » souhaitée par M. Attal serait-il très différent du gouvernement actuel ? Il est déprimant d’espérer que le « moins pire » de ce dimanche soir soit un gouvernement d’« union » n’unissant personne, d’où une quasi-paralysie de l’action publique sur fond de violences front contre front – tout ça dans l’attente des prochaines élections où les castors que nous sommes verront nos fragiles barrages emportés.

Référence

Fossette, 202 rue du Faubourg-Saint-Martin, 75010 Paris – 09 83 90 89 30.

Nazie, antisémite, cette candidate du Front ? Juste blagueuse !