BREF ÉLOGE DES LIVRES TROP LONGS

17 juillet 2019

Ayant consacré mon été 2018 à la lecture des Voyages de Gulliver et mon hiver à celle de Frankenstein, mon été 2019 s’est lancé avec le Nautilus du capitaine Nemo, au cours de ses Vingt mille lieues sous les mers.

Que c’est long ! Que c’est bon !

Il y a bien des étés, ma passion de la lecture s’est forgée dans les longueurs de Jules Verne, celles de Dumas, des insupportables attentes qui rythment Robinson Crusoé, Ivanhoé, Moby Dick ; tant de chefs-d’œuvre de la littérature mondiale, du Quichotte à Proust en passant par Tolstoï.

Un des effets de la crétinisation mise en œuvre par Google et autres Netflix est de nous rendre inaccessibles les délices de ce genre de lectures où la soumission volontaire au temps d’un autre nous réapprend à nous laisser glisser dans la texture profonde du nôtre. Là où le capitalisme moderne crie : « vite ! vite ! plus vite ! », voici notre temps retrouvé : lent, interminable parfois (ah ! les pages de classification des poissons ou des coraux, ah ! les détails de la chasse aux perles), rapide quand l’action s’enclenche ou que les passions s’attisent et nous font battre le cœur – il est comme le temps de nos vies mêmes qui tour à tour se traînent, ensablées, et filent sous nos pas à une allure où nous perdons le souffle.

Alors cet été, profitez des heures rendues à la rêverie, à la sieste en toutes ses versions, aux joies du corps en leurs diverses formes, mais aussi n’hésitez pas à vous immerger dans un de ces gros livres, un de ces livres trop longs qui distillent leurs enchantements bien au-delà des saisons.