Ceux que nous aimons ne sont pas tous admirables et ceux que nous admirons pas forcément aimables.
La vie nous fait parfois le cadeau de rencontrer un (petit) nombre d’êtres qui sont l’un et l’autre.
C’est donc un privilège plus qu’un devoir pour moi – quelques mois après sa disparition – d’accompagner la publication d’un volume de textes courts (articles, préfaces, interventions dans des colloques) du merveilleux Tzvetan Todorov, « paysan du Danube » (comme il se désignait lui-même), devenu l’un des intellectuels français les plus respectés et lus en Europe et dans le monde. Ayant été peu prophète en un pays dont il avait adopté la langue, la cuisine et la partie des traditions intellectuelles privilégiant l’esprit de tolérance à celui de fureur, Tzvetan travaillait à distance des polémiques, attentif au monde par amour des êtres, mais préférant la tranquillité de l’étude et de la réflexion à l’agitation des phrases à l’emporte-pièce.
Quelques semaines avant sa mort, sa lucidité intellectuelle intacte, il mettait au point sur son lit d’hôpital la table des matières de ce volume, dans les moments de répit que la maladie lui laissait. L’aide de ses enfants Léa et Sacha, l’amitié du philosophe André Comte-Sponville et l’engagement sans réserve d’un éditeur vont rendre cette publication possible en février prochain, pour le premier anniversaire de sa mort. Pour ses lecteurs, comme pour d’autres qui ne le connaissaient pas, ce sera une belle occasion de découvrir l’univers de ce Bougre aimable et admirable.
Référence : Vivre et lire, de Tzvetan Todorov, édition préparée par Léa et Sacha Todorov, préface d’André Comte-Sponville (à paraître aux éditions Robert Laffont en février 2018)